Perturbateurs endocriniens : les travaux de recherche se poursuivent avec l’acquisition d’un spectromètre de masse

En septembre 2017, le CHU de Poitiers a fait l’acquisition d’un nouveau spectromètre de masse, avec le soutien financier du fonds Aliénor. Cet équipement, d’une valeur de 350 000 euros, accélère les travaux de recherche sur les perturbateurs endocriniens. Ce projet, porté par le professeur Virginie Migeot, cheffe du service de santé publique au CHU de Poitiers et responsable au sein de l’unité Inserm CIC 1402 de l’Axe HEDEX, a pour but de déterminer l’impact de ces perturbateurs endocriniens (PE) sur la santé humaine et sur l’environnement.

Spectromètre de masse
Spectromètre de masse

Le spectromètre de masse est un équipement qui a la particularité de détecter et de quantifier la concentration, même la plus infime, de perturbateurs endocriniens dans les fluides biologiques humains (sang, lait, urines, selles…). On appelle perturbateurs endocriniens toute substance ou molécule étrangère à l’organisme qui agit sur l’équilibre hormonal et produit des effets indésirables sur la santé. Ces composés chimiques environnementaux peuvent altérer les fonctions telles que la croissance, le développement, le comportement ou la fonction sexuelle et reproductrice. Ils sont présents dans notre alimentation, l’eau, certains médicaments, mais aussi dans les produits cosmétiques et ménagers. On les retrouve également dans l’environnement, à cause des pulvérisations de pesticides et autres polluants dans l’agriculture.

Jusqu’alors, les tests sur la recherche de perturbateurs endocriniens dans l’organisme étaient réalisés avec un spectromètre de masse installé au sein du service de toxicologie, mais qui n’était pas dédié aux travaux de recherche. A l’arrivée du nouvel équipement, et après une période de tests et de formation des utilisateurs, l’équipe a choisi de doubler les analyses afin de comparer et mettre en relation les résultats obtenus sur les deux machines pour s’assurer d’une bonne utilisation et programmation du nouveau spectromètre.

Initialement, le projet de recherche portait sur les femmes enceintes, les prématurés, les patients diabétiques et les patients insuffisants rénaux, afin de valider les techniques analytiques qui permettent de quantifier les perturbateurs endocriniens dans le lait maternel, les urines et le sang. Mais depuis l’acquisition du nouvel équipement, et au vu de ses possibilités et de sa performance, l’équipe a pu étendre ses travaux aux patients atteints de cancers hormono-dépendants, c’est-à-dire les cancers du sein, de la prostate et de la thyroïde. Dans ces cas, les tests sur les fluides biologiques ne sont pas toujours suffisants et doivent être étendus aux tissus adipeux prélevés au plus près de la tumeur au moment de l’acte chirurgical. Ces techniques de prélèvement doivent aujourd’hui être améliorées, afin d’obtenir une meilleure quantification des PE dans l’organisme, ainsi qu’une estimation fiable de l’imprégnation corporelle de ces substances chez l’homme.

Les multiples possibilités du spectromètre permettront aussi de suivre dans le temps les concentrations biologiques des perturbateurs endocriniens des femmes enceintes et de leur bébé. En plus des prélèvements déjà effectués dans l’eau de boisson, le lait, les urines et le sang, il est en effet prévu de réaliser des tests sur le placenta et sur les selles de la maman et du bébé, afin d’étudier leur microbiote. Ce dernier pourrait avoir un effet sur ces concentrations et donc sur l’exposition de ces populations. Les cheveux sont également sur la liste des prochaines matrices biologiques à explorer par l’équipe de recherche.

Aujourd’hui, le spectromètre de masse est utilisé à temps plein et prioritairement sur des cas de patients des départements de la Vienne et des Deux-Sèvres. Il est à ce jour le seul de la région Nouvelle-Aquitaine à être utilisé dans le cadre de recherche sur des matrices biologiques humaines pour l’étude de l’exposition aux perturbateurs endocriniens.

Installé au pôle biospharm, il trouvera naturellement sa place dès l’automne prochain au sein du laboratoire de recherche de la Vie-la-santé, ce nouvel espace contextualisé, sur le site de la Milétrie, qui a pour missions de promouvoir, sensibiliser, informer et éduquer le grand public à la santé et aux facteurs environnementaux.