Le billet de Frédérick Gersal : le scrupule se prescrit!

« Avoir des scrupules » est une expression courante qui signifie se poser des questions, réfléchir, hésiter quant à la conduite à tenir.

Alors, me direz-vous, quel est le rapport avec le milieu médical ?

Pour comprendre, il faut remonter aux origines du mot scrupule, à son étymologie latine : « scrupulus » qui désigne une petite pierre, un caillou pointu, mais c’est aussi une unité de mesure romaine. Un scrupule équivaut à la 24ème partie d’une Once, soit 1/24ème de l’Once et pour être plus précis un Scrupule pèse environ 1,27 gr, c’est-à-dire un tout petit poids. Ce mot est également utilisé par les Romains pour désigner leur plus petite monnaie d’or pesant normalement le poids d’un Scrupule !!!

C’est bien là que se trouve le lien avec la médecine !

Cette définition à la fois comme unité de mesure et comme monnaie va se répandre dans tout l’Empire Romain, alors il n’est pas étonnant de retrouver quelques uns de ces scrupules en Gaule. Dans les très anciennes mesures françaises on trouve le scrupule, comme poids équivalent au tiers d’un Gros, c’est à dire à 24 Grains, soit un peu plus d’un gramme. Cette mesure est restée très longtemps attachée, notamment au métier d’apothicaire, ancêtre de nos pharmaciens, qui pouvait alors donner à sa patientèle :  « 1 scrupule » de tel ou tel produit, suivant les prescriptions du médecin.

Mais ce « scrupule », ce fameux petit caillou, cette petite pierre bien pointue qui est à l’origine de toutes ces histoires, pouvait aussi être un empêcheur de tourner en rond ! Ou tout au moins un empêcheur de marcher droit et longtemps. Ce caillou, pourtant si petit, d’un poids si insignifiant pouvait réussir à faire boiter les soldats de la puissante armée romaine. Car lorsque ce caillou pointu avait l’audace de se glisser dans la sandale, la « caligae », du soldat, il ne pouvait garder l’allure et il marchait en se tordant de douleur. Le scrupule, c’est un peu le « Talon d’Achille » du militaire. A lui seul, il peut faire vaciller ce « Géant au pied d’argile » !

Alors le Légionnaire n’a guère le choix, soit il souffre en silence avec le risque de se blesser gravement, soit il sort du rang et du coup ralentit la progression de la Légion toute entière, le temps d’enlever le scrupule de sa sandale, avec l’assurance de se faire sermonner par son supérieur.

Et bien à cet instant précis, au moment de ce choix cornélien, le soldat romain avait bien « quelques scrupules » !